ROAD LIFE
Cet opus s’inscrit dans une réflexion sur le statut de l’image et son devenir au regard de la dématérialisation de celle-ci. Je tire un fil au détour d’une photo et d’un exercice, né avec la généralisation de la photographie au XXe siècle et repris par Richter : utiliser des images existantes comme matière à peindre, libérer cette image de son intention initiale et donner à voir autre chose par la mise en place d’un procédé spécifique.
Road life met en œuvre un double paradoxe : à la fois inventaire de mon histoire et réécriture, interrogation sur une modalité de représentation, le devenir d’une image et sa transfiguration par recyclage en objet figuratif.
Le temps qui passe fait de la photo commune (de vacances, de famille, souvenir), une porte ouverte sur la fiction. En se libérant de la cause qui l’a fait naître, j’ouvre le champ à une autre histoire. Contemplant ces clichés d’un autre temps, pris par moi-même ou mes proches, je suis saisi par le « je est un autre ». Sont alors convoqués à la fois mon histoire, celle de mes proches et enfin, celle qui s’écrit entre eux et moi au fil des évènements et des lieux : une trajectoire, qui par ce regard rétroactif est réécrite : ce qui fut, n’est plus…
En recyclant ces petits restes d’histoire je métamorphose le passé, j’en change le statut, comme ce support qui, de banal, en disparaissant (nous ne faisons plus tirer nos photos souvenirs, elles gisent dans nos téléphones et tablettes) opère un basculement de valeur.
L’image non esthétisante et sa légende, pur mémorandums, sont intégrés dans un montage pictural esthétisant où pointe l’enjeu du geste de peindre, écrit un non-récit et produit un nouvel objet.